- Imaginons que vous soyez inconsciemment convaincu que le monde est dangereux, et qu'il faut s'en méfier, se protéger.
Ce serait votre croyance, d'accord?
- D'accord.
- Si cette croyance est inscrite en vous, alors d'après vous sur quoi va se porter votre attention à l'instant présent?
Quelle informations allez-vous donc capter si vous croyez, au fond de vous, que le monde est dangereux?
- Eh bien… voyons… je ne sais pas, j'imagine que je commencerais par me méfier un peu de vous, puisque, après tout, je ne vous connais
pas! Je crois que j'observerais surtout votre visage pour essayer de lire vos pensées, de comprendre ce qu'il y a peut-être derrière vos paroles gentilles. Et je tenterais aussi de repérer
d'éventuelles incohérences dans votre discours, pour savoir si vous êtes fiable ou pas. Et puis, je garderais un oeil sur la porte du jardin pour m'assurer qu'elle reste ouverte et que je
pourrais partir facilement s'il y avait un problème. voilà, quoi d'autre… voyons… peut-être ferais-je aussi attention à cette poutre qui à l'air de tenir par l'opération du Saint-Esprit et qui
pourrait me tomber dessus. Et je garderais un oeil sur le gecko que j'entends se balader entre les poutres, car j'aurais peur qu'il descende me mordre. Je me méfierais de ce genre de reptiles. Je
remarquerais aussi que la natte est usée, et que je pourrais attraper des échardes si je ne prenais pas garde.
- C'est cela. Votre attention serait captée par les risques potentiels qui existent dans toute situation. et si l'on
vous demandait, yeux fermés, de décrire la situation, ce sont notamment ces éléments qui vous viendraient à l'esprit.
- Sans doute, en effet.
- Maintenant, imaginez que vous ayez une croyance opposée, à savoir que le monde est amical, que les gens sont gentils,
honnêtes et fiables, et que la vie offre quantité de plaisirs bons à prendre. Faites comme si cette conviction était profondément enfouie en vous. sur quoi se porterait votre attention, en
ce moment, et que pourriez-vous décrire, les yeux fermés et les oreilles bouchées?
- Je crois que je parlerais des plantes, qui sont vraiment très belles, de ce petit vent agréable qui rend la chaleur supportable. Je
crois que je parlerais aussi du gecko, car je me serais dit: "cool, il y a un gecko sous la toiture, au moins, il ne doit pas rester d'insectes rampants dans les parages!" Et puis, je décrirais
le visage serein de cet homme sympathique qui me fait découvrir des tas de choses intéressantes sans même me faire payer!
- Exactement! Ce que l'on croit de la réalité du monde environnant, agit comme un filtre, comme une paire de lunettes
sélective qui nous amène à surtout voir les détails allant dans le sens de ce que nous croyons… Si bien que cela renforce notre croyance. La boucle est bouclée.
Si l'on croit que le monde est dangereux, on va effectivement porter son attention sur tous les dangers réels ou
potentiels, et on aura de plus en plus le sentiment de vivre dans un monde dangereux.
- C'est logique finalement
- Mais cela ne s'arrête pas là. Nos croyance vont aussi nous permettre d'interpréter la réalité.
- Interpréter?
- Vous évoquiez, tout à l'heure, les expressions de mon visage. Ces expressions, tout comme ma gestuelle d'ailleurs,
peuvent être interprétées de différentes manières. Vos croyance vont vous aider à trouver une interprétation : un sourire sera perçu comme un signe d'amitié, de gentillesse, de séduction, ou
d'ironie, de moquerie, de condescendance. Un regard insistant, comme un signe marqué d'intérêt ou, à l'inverse, comme une menace, une volonté de déstabilisation. Et chacun sera convaincu de son
interprétation. Ce que vous croyez sur le monde vous conduit à donner un sens à tout ce qui est ambigu ou incertain… Et cela renforce vos croyances. Une fois de plus.
- Je commence à comprendre pourquoi vous disiez que ce que l'on croit devient notre réalité.
- Oui, surtout que cela ne s'arrête pas là.
- C'est infernal votre truc!
- Quand vous croyez une chose, elle vous amène à adopter certains comportements, lesquels vont avoir un effet sur le
comportement des autres dans un sens qui va, là encore, renforcer ce que vous croyez.